Au plus fort d’une guerre régionale, le Premier ministre israélien démet de ses fonctions son ministre de la Défense. La raison officiellement évoquée est que « la confiance est érodée », écrit le cabinet de Benyamin Netanyahu. Le limogeage de Yoav Gallant intervient sur fond d’une affaire retentissante en Israël : la fuite de faux documents classés confidentiels. Et Benyamin Netanyahu chercherait à faire porter le chapeau à son désormais ancien ministre de la Défense, estiment des analystes israéliens.
Les documents israéliens secrets qui ont fuité dans la presse étrangère avaient un objectif : manipuler l’opinion publique en faisant croire que le Hamas rejette tout accord de trêve à Gaza, et donc refuse la libération des otages. Qui a intérêt à orchestrer une telle situation ? En Israël, les regards se tournent vers Benyamin Netanyahu. Mais la justice doit encore le prouver. Alors que plusieurs de ses collaborateurs viennent d’être arrêtés, le Premier ministre israélien, lui, a choisi de faire porter le chapeau à son ministre de la Défense.
« La manœuvre ne convainc personne »
« Il y a les développements que l’on connaît sur les fronts du conflit militaire à Gaza, au Liban. Il y a l’Iran qui se prépare à la riposte. Et finalement, la bombe qui nous tombe dessus, ne vient ni de l’Iran, ni du Yémen, ni du Liban. Elle vient de l’intérieur, explique Yigal Palmor, ancien haut diplomate israélien. Limoger un ministre de la Défense en pleine guerre […], on comprend que [Netanyahu] veut renverser le cours des choses et parler de Yoav Gallant comme si c’était lui le responsable des fuites. La manœuvre ne convainc personne. »
Une manœuvre qui intervient le jour de la présidentielle américaine. « Ce n’est pas le fruit du hasard, affirme l’ancien diplomate. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un calcul millimétré. Le jour de l’élection, l’appareil politique est paralysé aux États-Unis, en termes de politiques étrangères. [Netanyahu choisit ce moment], parce que les États-Unis ne peuvent pas réagir. »
Le ministre Yoav Gallant « a été viré uniquement pour des raisons politiques », a lancé le chef de l’opposition Yaïr Lapid, lui-même brièvement ancien Premier ministre, lors d’une conférence de presse avec les trois autres dirigeants des partis d’opposition. « En plein milieu d’une guerre, alors qu’Israël se bat sur plusieurs fronts, M. Netanyahu affaiblit et nuit à l’armée (…) simplement pour faire passer la loi d’exemption » au service militaire obligatoire pour la communauté juive ultra-orthodoxe, a taclé M. Lapid. La rue israélienne a également réagi. Plusieurs manifestations ont eu lieu à travers le pays.
Mais « ce n’est pas évident que la mobilisation se poursuive. Les gens sont épuisés par le bras de fer permanent avec le gouvernement », conclut Yigal Palmor.
RFI